Le Blanc comme source d’inspiration
A partir de demain et jusqu’au 12 janvier, la Galerie Carole Decombe est « De Blanche Humeur » et propose une nouvelle exposition réunissant des créations inédites de cinq artistes régulièrement exposés dans nos murs autour d’un thème commun : le blanc. L’occasion ici de redécouvrir cette couleur inspiratrice aux possibilités infinies.
En effet que de significations lui ont été données ! Que de symbolisme ! Le blanc inspire, il est intemporel et universel.
Ce n’est pourtant pas réellement une couleur. Pour Newton, c’est la teinte obtenue en mélangeant la lumière de toutes les couleurs. Pour Goethe et Hering, c’est une couleur étalon : il est, associé au noir, l’une des trois paires de couleurs pures qui orientent la perception visuelle. En colorimétrie, c’est la plus lumineuse des valeurs de gris.
Son rapport aux autres couleurs est primordial, le blanc réfléchit la lumière quand les autres couleurs la filtrent, par réfraction il la disperse et vient ainsi illuminer les autres tons, les contraster, les faire vibrer.
Pigments naturels (craie, chaux, céruse, blanc d’Espagne ou blanc de Meudon…) ou artificiels (blanc de zinc et de plomb), teinte cassée, écrue… Les nuances sont nombreuses et les possibilités multiples. C’est une couleur polysémique. Et ses utilisations, ses symbolismes changent selon les cultures et les époques…
En art, le blanc est le point de départ de la création. Il est à la fois le blanc idéel du néant, d’où va naître le geste créatif, et le blanc matériel que l’on retrouve sur la plupart des supports artistiques : la page de papier, le mur enduit d’apprêt, la toile préparée, le bloc de marbre non dégrossi. Ainsi, pour Vassily Kandinsky «Le blanc sonne comme un silence, un rien avant tout commencement».
Le blanc peut donc être perçu comme un temps, une matière, une lumière, mais il peut aussi être porteur de bien d’autres idées.
Le blanc est la teinte première, c’est celle de l’aube qui trouve justement son étymologie dans le latin alba, qui signifie « de couleur blanche » : c’est le moment où le ciel blanchit, le commencement. Le début du jour comme de toute chose.
La couleur blanche est celle de la pureté, de la vertu et de l’innocence. Le mot « blanc » vient du germanique blank signifiant « clair, sans tâche ». C’est donc une couleur morale que l’on retrouve sur la robe de mariée, l’aube des nonnes…
Le blanc est une couleur sacrée, il évoque la gloire divine, et le Bien, opposé au noir, qui représente lui le Mal. Par réfraction, il nous illumine, nous éblouit. Symbole du Bien, il est aussi symbole de paix (le drapeau blanc, la colombe).
D’autres valeurs morales sont prêtées au blanc et cette couleur est bien souvent celles de principes nouveaux à des époques données. Il semble qu’en art (mais pas seulement), on retourne régulièrement au blanc. Non pas comme une mode, mais comme pour signifier un besoin de faire table rase de ce qui a précédé et de repartir vers de nouveaux concepts, vierges des influences passées.
Le Blanc est la couleur des statues de marbre, la teinte (utopique) de l’Antiquité. Si les statues et monuments grecs étaient peints, ils ont, avec les siècles, perdu leurs coloris. Leur blancheur trouvée, nouvelle, s’est alors gravée dans nos inconscients comme l’antique couleur d’une grandeur passée. Pour J.J. Winckelmann qui célébrait cette blancheur de l’art grec – celle de l’Apollon du Belvédère par exemple – et qui militait pour un retour aux valeurs antiques, le blanc était synonyme de beauté, de santé, de retenue et de raison. Pour lui, contempler une statue grecque illuminait à la fois l’oeil et l’esprit.
Au Siècle des Lumières, le blanc se teinte des valeureux principes de justice, d’égalité et de raison. Artiste de son temps et partisan d’une réforme sociale, le céramiste J. Wedgwood se consacra à trouver le blanc parfait, à travers de très nombreuses expérimentations – c’est celui du Queen’s Ware. A la fois révolutionnaire convaincu et céramiste en titre de la Reine Charlotte, il a réussi à introduire la simplicité d’un service de blanc uni sur les tables royales. Avec lui, le blanc devient couleur sociale.
Mais le blanc est résolument moderne, au XXème siècle, il devient la teinte de la simplicité, du vide. En 1925, Le Corbusier développe sa Loi du ripolin, pour lui il faut recouvrir les murs de blanc, et faire ainsi fi des couleurs et des ombres superflues qui nous encombrent trop.
Enfin, le blanc est une couleur sensuelle, il est froid comme la neige, léger comme la plume, le nuage, la dentelle, il évoque également la douceur du duvet, de la laine ou du coton.
Le blanc inspire donc bien des sensations et des pensées. Pour cette exposition collective, la Galerie Carole Decombe a donné carte blanche aux artistes avec qui elle a déjà collaboré.
A découvrir du 4 décembre au 12 janvier…